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A model-based approach to the tempo of "collapse": The case of Rapa Nui (Easter Island)

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Une approche du rythme "d'effondrement" basée sur un modèle : Le cas de Rapa Nui (l'île de Pâques)

DiNapoli Robert J., Rieth Timothy M., Lipo Carl P., Hunt Terry L.

Journal of Archaeological Science, Volume 116, 2020

 https://doi.org/10.1016/j.jas.2020.105094

 

Pour citer cet article :
DiNapoli, R. J., Rieth, T. M., Lipo, C. P., & Hunt, T. L. (2020). A model-based approach to the tempo of “collapse”: The case of Rapa Nui (Easter Island). Journal of Archaeological Science, 116, 105094.

Résumé

Rapa Nui (l'île de Pâques) est un cas d'étude parfait pour analyser l'effondrement d'une société suite à une perte de diversité et de productivité de l'environnement. La raison pour laquelle la population de l'île a fait preuve d'une telle énergie et d'un tel investissement dans la construction et la disposition des grandes statues (appelées les Moaï) est au coeur du débat sur l'effondrement de cette société. Le postulat de base commun  à tous les ces débats suppose un arrêt de la production de statues vers 1600 après J.C., à la suite d'une catastrophe écologique, culturelle et démographique.

Ce postulat est particulièrement populaire dans les domaines externes à l'archéologie, qui traitent leur effondrement comme un fait historique et utilisent Rapa Nui comme modèle d'effondrement de façon plus générale. La résolution du rythme des évènements "d'effondrement", cependant, est souvent ambigüe en raison du manque de modélisations formelles, de l'utilisation non critique des datations au radiocarbone et du manque d'attention porté aux informations intégrées dans les caractéristiques stratigraphiques. Dans cette étude, nous utilisons une approche basée sur un modèle bayésien (explication de la pensée bayésienne par Hygiène Mentale) pour examiner le rythme des évènements d'effondrement associé aux arguments liés à cet effondrement de Rapa Nui.

Nous intégrons des dates radiocarbones, une stratigraphie relative architecturale et les récits ethnohistoriques pour quantifier le début, le rythme et la fin des constructions des monuments afin de tester l'hypothèse d'effondrement.

Les plateformes cérémonielles sur lesquelles sont disposés les Moaï sont appelées des ahu. Nous démontrons que la construction de ces ahu a commencé peu après la colonisation et s'est rapidement intensifiée, notamment entre le début du 14e siècle et le milieu du 15e siècle après J.C., avec un rythme de périodes de constructions constant qui a perduré après le premier contact avec les européens, en 1722.

Nos résultats suggèrent des peuples qui ont poursuivi leurs traditions à long terme, et ce malgré les impacts de l'arrivée des européens, ce qui soutient le nouveau modèle émergent de communautés résilientes. Méthodologiquement, notre approche, basée sur des modèles testant les hypothèses centrées sur la chronologie de l'effondrement, peut être étendue à d'autres études de cas dans le monde où des débats similaires restent encore difficiles à résoudres.

DiNapoli et al., 2020 - modèle expliquant la théorie de l'effondrement et sa chronologie pour le cas de Rapa Nui, l'île de Pâques


Synthèse détaillée de l'Article

Les architectures monumentales, telles que les tertres artificiels (ou monticules de terre), les cercles de pierre, les complexes souterrains (exemple du complexe funéraire de Khéops) ou les temples (exemple des temples grecs) sont autant de traces de l'achèvement de travaux collaboratifs de grande ampleur réalisés par les communautés humaines au cours des derniers 10 000 ans. La construction de ces structures nécessite obligatoirement différents niveaux de coopération de groupe. De fait, leur apparence, leur élaboration et leur arrêt à différentes périodes de temps et dans différents endroits autour du monde sont autant de preuves archéologiques de changements dans l'organisation sociale et sa complexité (Abrams, 1989 ; DeMarrais et al., 1996 ; Kirch, 1990 ; Marcus et Flannery, 2004 ; Trigger, 1990).

Toutefois, les conditions environnementales et sociales liées à l'émergence de ces constructions sont si variées que trouver une explication à la dynamique de construction de ces monuments dans les diverses régions du monde est particulièrement ardu - et est donc un challenge central pour les archéologues (DiNapoli et al., 2019 ; Howey et al., 2016).

Mais avant de commencer toute recherche, il est essentiel de donner un sens au terme "d'effondrement" et au processus qui y mènent (ou peuvent y mener). La plupart des universitaires s'accordent à dire que ce genre d'évènement implique généralement la fin ou le déclin de certains genres d'activité (e.g. Dunnell & Greenlee, 1999 ; Middleton, 2017 ; Turner & Sabloff, 2012) :

  • qu'il s'agisse de changement dans les modèles de peuplement, comme le dépeuplement des centres politiques,
  • le déclin des aspects centraux de l'activité religieuse et sociale, comme la fin de la construction de monuments,
  • ou d'autres facteurs.
Références Bibliographiques