Hervé Gillet nous parle un instant de la crise Messinienne
Script de la vidéo
Je m'appelle Hervé Gillet, je suis enseignant-chercheur à l'Université de Bordeaux et je travaille en géosciences marines, en géologie marine.
Mes chantiers actuels sont plutôt centrés sur le golfe de Gascogne avec par exemple comme chantier préféré actuellement le canyon de Capbreton.
Mais dans ma jeunesse, j'ai été amené à travailler sur ce fameux événement du Messinien.
La particularité, c'est que c'est pendant ma thèse que j'ai été amené à travailler sur ce sujet là, et de façon assez atypique, alors que tous mes collègues travaillaient sur le Messinien en Méditerranée, moi, j'ai été amené à travailler sur l'événement Messnien, mais dans un bassin satellite au bassin méditerranéen qu'est la Mer Noire.
Donc j'ai été chercher des indices de la manifestation de cet événement en mer Noire et notamment je suis allé rechercher là bas, par le biais d'un outil, la sismique réflexion, des traces de la surface d'érosion messinienne en mer Noire. Mais ça, c'était il y a une bonne vingtaine d'années.
Qu'est-ce que le Messinien ?
Alors le Messinien, c’est un événement tout à fait particulier, qui est assez peu connu, qui s'est déroulé il y a environ 5 millions d'années, c'est très, très récent à l'échelle des temps géologiques et ça correspond en fait à un épisode où on suppose qu'une partie de la Méditerranée s'est au moins partiellement asséchée, avec, selon les scénarii qui sont envisagés, des chutes du niveau marin en mer Méditerranée qui vont être de l'ordre de plusieurs centaines de mètres jusqu'à dans certains scénarii, 1000-1500 mètres de descente de niveau marin.
Et donc cet événement est associé à la fermeture du détroit de Gibraltar.
Ça a été fait façon tectonique, l'Afrique remontant depuis un moment déjà vers l'Europe.
Il y a eu un épisode où, en fait, ça a fermé, les communications entre la Méditerranée et l'Atlantique au niveau de ce qui est actuellement Gibraltar. Mais à l'époque, la géographie n'était pas exactement ce qu'on connaît aujourd'hui.
Et en fermant ces communications, la mer Méditerranée, qu'est en, ce qu'on appelle, déficit hydrique, c'est-à-dire qu'elle ne reçoit pas assez d'eau pour compenser son évaporation.
Actuellement, c'est le cas parce qu'elle est ouverte sur l'Atlantique, donc toute l'eau qui s'évapore en Méditerranée est compensée par des apports qui arrivent par le détroit de Gibraltar.
Si jamais vous fermez ces échanges, la mer Méditerranée s'évapore entre guillemets. Et ça, c'est ce qui est arrivé il y a 5 millions d'années.
Quelles sont les conséquences d'un tel “assèchement” ? Il va se passer exactement la même chose que quand on assèche un marais salants : si vous asséchez une mer, eh bien il va se déposer ce qu'on appelle des évaporites. Avec les plus connues d'entre elles, c'est le sel ou le gypse.
Donc, en Méditerranée, il y a 5 millions d'années, se sont déposées des énormes couches, en termes d'épaisseur, d’évaporites dans le fond du bassin et surtout, puisqu'il n'y avait "plus d'eau", au moins partiellement, dans la Méditerranée, les bords de la Méditerranée se sont retrouvés à l'air libre et donc ont été exposés à l'érosion. Donc ça, ça implique la formation d'une surface d'érosion sur les bords de la Méditerranée qui est contemporaine de cet événement.
Et ça, c'est un des marqueurs auquel je me suis le plus intéressé.
Que ce soit en Méditerranée, comme je vais le présenter dans la conf grand public, soit en mer Noire pour mes travaux de recherche en thèse.